main

POIVRE, Pierre

Nom POIVRE
Prénoms Pierre
Dates 1719  -  1786
Artiste Alexis Grogard
Lieu Dépôt, Blue Penny Museum

Savant et administrateur. Né à Lyon, le 23 août 1719, fils de Hilaire Poivre, commerçant, et de Marie Pompallier. Fit de brillantes études chez Ies missionnaires de St Joseph (Lyon) puis aux Missions Etrangères (Paris) en vue d’entrer dans Ies ordres. Avant d'avoir reçu les ordres fut envoyé en Chine, où, par la suite d’une méprise, il fut emprisonné à Canton et dut apprendre Ie chinois pour se justifier.

En 1745, Ie Dauphin, qui Ie ramenait en France, fut attaqué et pris par un vaisseau anglais; Poivre eut Ie bras droit emporté par un boulet durant Ie combat. Débarqué à Batavia par ses capteurs, il y étudia Ia culture des épices dont les Hollandais détenaient aIors Ie monopole. Passa ensuite à Pondichéry d'où il se rendit, sur I‘escadre de Labourdonnais, à L’île de France, Ie 10 décembre 1746. Rentra avec, Labourdonnais en France, Ie 6 avril 1747, mais n'y parvint qu’à la signature de la paix (10 octobre 1748), ayant été pris en cours de route par les Anglais. Forcé par son infirmité de renoncer au sacerdoce, il proposa à Ia Compagnie des Indes de fonder un comptoir en Cochinchine et de ravir aux Hollandais le .monopole des épices. Partit sur Ie Montaran qui le relâcha à I'île de France du 13 mars au 16 avril 1749. Fonda son comptoir à Taï-To et revint ici Ie 10 avril 1750 avec plusieurs plantes utiles, notamment le riz sec de Cochinchine. Le 2 juin il quitta l'île de France sur le Mascarin pour aller chercher des plantes à épices à Manille. Revint, le 2 décembre 1753, après un .périlleux voyage sur Ie Rouillé avec cinq muscadiers et quelques girofliers. Repartit, Ie 1ier mai 1754, sur la Colombe et rapporta, le 8 juin 1755, un plus grand nombre de plants que Fusée Aublet (q.v.) fit périr en les arrosant d’eau bouillante. N'ayant pu obtenir du gouverneur René Magon (q.v.) un vaisseau pour une nouvelle expédition, Poivre rentra en France, le 26 avril 1756, sur le Pondichéry. Fut reçu à l'Académie des Sciences et obtint une pension du Roi. Acquit alors dans la banlieue lyonnaise une propriété appelée La Freta où il pensait finir ses jours dans l’étude lorsque Ie Roi Ie chargea d'aller instaurer le gouvernement royal à l'Ile de France, en qualité d'Intendant (1ier juillet 1766). Avant de partir il épousa, Ie 15 septembre 1766, à Pommiers (Lyonnais), Françoise Robin, fille mineure d’Antoine Robin, ancien magistrat, et de Marguerite Colard (il avait alors 47 ans). Arriva ici avec son collègue, le gouverneur Daniel Dumas (q.v.), le 14 juillet 1767 et prononça peu après son arrivée deux discours uniques dans les annales de l‘île de France et qui renfermaient tout un programme.

Administrateur de grande valeur mais doué d'un caractère difficile, il se querella avec Dumas, puis avec son successeur Desroches (q.v.), et donna à 1a colonie Ie fâcheux exemple de la mésentente entre les chefs. II n'en parvint pas moins à accomplir une œuvre considérable qui peut se résumer ainsi;

  1. conquête des épices par trois nouvelles expéditions aux ordres de MM. Provost et d'Etchéverry (q.v.);

  2. introduction de l'imprimerie;

  3. création du jardin botanique des Pamplemousses sur les terrains de Mon Plaisir, ancienne résidence de Labourdonnais, où il s’était installé;

  4. redressement financier et rétablissement de la santé morale de la colonie;

  5. reconstruction de 1a ville de Port-Louis et agrandissement du port;

  6. tentative de doter l’île d'un système municipal (qui fut désapprouvé par Ie Ministre) et d'une véritable élite intellectuelle.

II attira, en outre, a l'île de France' un grand nombre de voyageurs et de savants dont le séjour profita beaucoup à la colonie. C'est aussi lui qui initia Bernardin de Saint Pierre (q .v.) à l’histoire naturelle, ce dont Bernardin Ie remercia en essayant de lui prendre sa femme. Le 23 aout 1772 il quitta l'Ile de France sur l'Indien. A Paris, où on lui reprochait sa mésintelligence avec Desroches, il trouva l'apparence d'une disgrâce, mais, le 16 août 1775, obtint line pension de 12,000 livres. Mourut à Hyères, le 6 janvier 1786, laissant deux filles, Françoise Julienne Ile de France et Marie-Marguerite, nées à l'Ile de France. En février 1786 sa veuve épousa l'économiste Pierre Samuel Dupont de Nemours (1739-1817) qui a laissé une biographie de Poivre. Le nom de Poivre est inscrit sur l'obélisque Liénard au jardin des Pamplemousses mais il n'y a pas encore Ie monument que l'ile Maurice doit à sa mémoire.

 

A.TOUSSAINT

Bibliographie

St Elme Ie Duc: Ile de France, Maurice, 1925, pp. 83·102.

Louis Malleret: Pierre Poivre in Bull. de la Soc. des Études lndochinoises, Nouv. série, IX, No 4, oct-dec. 1934, pp. 69-70.

Dupont de Nemours: Notice sur la vie de M. Poivre Paris, 1780.

A. Boullée: Notice sur Poivre, Lyon, 1835.

Henri Cordier: Voyages de Pierre Poivre de 1748 à 1757 in Rev. Hist. Des Colonies Française, 6ème année, 1ier trimestre, 1918 pp. 1-88.

Pierre Poivre: Voyages d'un philosophe, Paris, 1794.

Edmond Pilon: Le roman de Mme Poivre in Revue des Deux Mondes, 15 nov. 1933, pp. 368·383.

Source

Extrait du Dictionnaire de Biographie Mauricienne, Pages 346-347.

Avec l'aimable autorisation de la Société de l’Histoire de l’Ile Maurice.