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1979, le 150e anniversaire de la RSAS

ROYAL SOCIETY OF ARTS AND SCIENCES OF MAURITIUS

150 TH ANNIVERSARY COMMEMORATION

OBELISQUE LIENARD

par

GUY ROUILLARD

Hommage rendu a la memoire de

James DUNCAN, John HORNE, Jean VINSON, et Octave WIEHE.

 

 

La Société Royale des Arts et Sciences de l'Ile Maurice célèbre cette année son 150e anniversaire. Une notice historique couvrant les années 1829 à 1979 a été rédigée par Madeleine LY-TIO-FANE et paraît plus loin. Je me contenterai de retracer brièvement les événements qui ont amenés la création de notre Société et quelques étapes parcourues durant ces 150 dernières années.

 

La Société Royale des Arts et Sciences de l’Ile Maurice a ses origines dans le projet d'Académie que rédigea Commerson en 1769. Toutefois, cette idée ne fut réalisée qu'en 1801 avec la création de la Société des Sciences et Arts de l'Isle de France lorsque l'équipe scientifique de Baudin s'arrêta chez nous. Avec le départ des savants la Société disparut et ce n'est qu'en 1805 que les colons relancèrent l’œuvre au sein de la Société Libre d'Emulation de l'Isle de France. Quelques années après l'occupation britannique de l'île en 1810, cette Société entra en léthargie.

 

Cependant, le Gouverneur Farquhar soucieux de relancer les travaux des sociétés savantes pour développer l'économie du pays, intéressa Charles Telfair à ce projet. Ainsi un prospectus pour la rénovation de la Société d'Emulation circule en 1826 par les soins de Julien Desjardins et aboutit à la création de la Société d'Histoire Naturelle de l'Ile Maurice en 1829. Les buts de la Société furent bientôt élargis pour comprendre l'Agriculture et l'Horticulture, et c'est I’adjonction de ces deux disciplines qui permit à la Société de survivre lorsqu'elle rencontra vers 1843 de sérieuses difficultés financières.

 

Les membres du gouvernement colonial, en particulier le Secrétaire Colonial George F. Dick, n'avaient pas tardé à évaluer le rôle que la Société d'Histoire Naturelle pourrait jouer dans l'avancement économique du pays, ainsi ils intervinrent auprès du Secrétaire d'Etat pour les Colonies afin qu'une subvention annuelle de £ 200 soit accordée à la Société: elle s'engageait de promouvoir l'agriculture et les arts industriels en réunissant des données nouvelles et en stimulant l'émulation parmi la communauté agricole en tenant des expositions et en décernant des prix. C'est ainsi que devant ces attributions élargies, la réorganisation de la Société devenait nécessaire. Un nouvel essor fut donc pris sous le titre de Société des Arts et des Sciences de Maurice le 24 août 1846.

 

La faveur royale consacra le rôle de la Société. Par l'intermédiaire du Duc de Sussex, Président de la Société Royale, et frère du Roi, les premiers contacts entre le Souverain et la Société d'Histoire Naturelle avaient été établis. Apres l'octroi du subside, la Reine ayant autorisé la Société à porter le titre de Royale, elle devenait le 16 juillet 1847 la Société Royale des Arts et Sciences de l'Ile Maurice, nom qu'elle a conservé à ce jour.

 

A la suite de la création en 1845 de son Comité Agricole, la Société Royale put faire face aux nombreuses crises qui secouèrent le monde agricole. Ainsi lors de l'apparition de la maladie blanche en 1847 qui amena la destruction de la variété Otahiti, alors sous grande culture, c'est sous les auspices du Comité de la Société présidé par Bojer, avec la collaboration du secteur agricole de la Réunion et l'aide de Diard que la variété put être remplacée par d'autres en provenance de Java. L’année suivante l'introduction du borer dans des testes de cannes venues de Ceylan, amena Bojer à se pencher sur les déprédations de cet insecte et établir les mesures à prendre en vue de son contrôle. La Société encouragea aussi la recherche en sucrerie et, grâce aux expositions de Londres et de Paris, les sucres fabriques à Maurice obtinrent un grand renom dans le monde.

 

Cependant la constitution de la Société ne lui permettait pas de dialoguer avec le mouvement local et le Ministre des Colonies sur les grandes questions d'emploi de main-d’œuvre étrangère, d'aide économique, d'importation de matériel de sucrerie ou du développement des communications. L'Ile Maurice entrant au milieu du 19e siècle dans une grande période de développement politique et constitutionnel, le Comité d'Agriculture de la Société Royale trouva une nouvelle dimension dans la création d'une Société d'Agriculture qui devint la Chambre d'Agriculture de l'Ile Maurice. Une période de collaboration étroite allait s'établir entre le Comité d'Agriculture de la Société Royale et la Chambre d'Agriculture basée sur un partage des champs d'activité : la Chambre ayant pour tâche les négociations avec les Gouvernements Colonial et Métropolitain et le Comité d'Agriculture s'occupant de liaison scientifique. La partie technique de son programme fut par la suite confiée à la Station Agronomique (1893) issue des considérations qui avaient dès 1845 occupé les délibérations du Comite d'Agriculture, études scientifiques qui allaient par la suite être entreprises successivement par le Département de l'Agriculture (1913), la Sugar Cane Research Station (1930) pour déboucher sur les travaux de l'Institut de Recherches de 1'Industrie Sucrière (1953).

 

Une autre contribution à la vie économique et culturelle du pays fut le don par la veuve de Julien Desjardins de ses collections d'histoire naturelle auxquelles Bouton joignit ses herbiers. Ainsi le Musée Desjardins réunit les travaux d'histoire naturelle qui au cours des années, complétés par l'étude de la géologie et de la météorologie devaient permettre l'élaboration de la faune et de la flore des Mascareignes, tout en soulignant le devoir de la communauté de préserver les ressources naturelles et de protéger les espèces et les essences indigènes. Afin de donner un cadre modern a ce musée et de promouvoir la vie culturelle par la création d'une bibliothèque publique, la Société dès 1859 avait réclamé un Institut pour l'abriter et offrir un cadre aux diverses sociétés culturelles qui avaient vu le jour depuis les années '40. C'est en 1880 que les projets pour la création du Mauritius Institute prirent corps. En 1945 la Société qui avait reçu l'hospitalité de l'Institut depuis 1884 s'affiliait a lui en lui accordant l'usage de sa belle bibliothèque.

 

Il est de mon devoir de rappeler que si, de nos jours, notre Société a évolué plus modestement en une société culturelle, elle a été I ‘inspiratrice de la création de certain corps constitués et a réuni parmi ses membres des noms illustres tels que Cuvier, patron de la Société, Adrien de Jussieu, Bory de Saint Vincent, William Hooker et Charles Darwin.

 

II est peut-être également utile de souligner le rôle qu'elle continue à jouer face à la dégradation rapide de notre environnement. D'ailleurs, le programme établi pour commémorer ce 150eme anniversaire a été axé sur un thème qui servira, nous l'espérons, a une prise de conscience pour la sauvegarde de cette importante partie, toujours menacée, de notre patrimoine national, représenté par sa flore et sa faune.

 

A l'aide d'un film, " La Genèse d'une Ile ", nous avons essayé de retracer le long processus qui amène l'établissement dans la nature d'une délicate balance biologique entre ses divers éléments.

 

Si, comme illustré, cette nature laissée à elle-même est un éternel recommencement, il n'en est pas moins vrai que l'intervention de l'homme, quoique nécessaire, peut, si elle est inconsidérée, détruire bien vite la balance biologique, processus généralement irréversible. II en découle la nécessite d'établir des réserves naturelles.

 

La Société a donc avec l'aide de généreux bienfaiteurs réussi à mettre sur pied une telle réserve au lieu-dit Le Mondrain.

 

C'est donc une grande joie de voir se réaliser un de nos rêves qui servira à la préservation d'une parcelle de notre flore indigène et assurera sa pérennité pour les générations futures.

 

Le Président (Robert Antoine)